La Bibliothèque nationale d’Irlande (BNI) vient de lancer un avis de marché européen pour numériser des collections de presse, de journaux, de photographies et de documents généalogiques. D’après un article de l’Irish Times, tous les modèles de partenariat seraient envisagés, qu’ils soient commerciaux ou à but non lucratif.
La BNI aurait examiné le partenariat de la British Library avec BrightSolid, un modèle commercial, où la collection de presse numérisée est consultable gratuitement dans les locaux de la British Library, et monétisée en ligne par BrightSolid.
La BNI aurait également examiné le partenariat de la Bibliothèque royale des Pays-Bas avec Google, où les livres doivent être gratuitement accessibles sur Google Livres et, à terme, sur le site de la Bibliothèque, où les métadonnées pourront être moissonnées par Europeana.
L’article ne précise pas si la BNI a également envisagé un partenariat du type de celui de la British Library avec le Qatar, qui doit aboutir à la mise en ligne gratuite des fonds numérisés.
SavoirsCom1 trouve anormal que les annexes de cet avis de marché ne soient pas en ligne, mais réservées aux candidats présélectionnés (cf. VO de l’avis de marché, plus complète que la VF). Cette absence de publicité empêche notamment de savoir si les collections concernées appartiennent ou non au domaine public, ou si elles sont susceptibles d’entrer dans le champ d’application de la directive européenne du 17 novembre 2003 concernant la réutilisation des informations du secteur public, ou de celle du 20 septembre 2012 sur certaines utilisations autorisées des oeuvres orphelines.
SavoirsCom1 souhaite qu’en Irlande, comme ailleurs en Europe, les collections faisant l’objet d’un avis de marché de numérisation soient clairement et publiquement identifiées, de manière à ce que les usagers et les citoyens puissent exprimer leur point de vue auprès de qui de droit (responsables des collections, responsables des partenariats, responsables politiques, etc.).
Conformément à son manifeste et à la recommandation de la Commission européenne, SavoirsCom1 souhaite que le domaine public numérisé reste librement et gratuitement accessible en ligne au public.
La numérisation, qui devrait être une chance pour la diffusion du domaine public, et permettre la constitution de biens communs numériques en ligne, conduit trop souvent à porter atteinte à l’intégrité du domaine public. A cet égard, SavoirsCom1 exprime ses plus vives inquiétudes à propos des partenariats public-privé lancés par la Bibliothèque nationale de France qui, en l’état actuel des choses, pourraient conduire à l’établissement d‘enclosures d’accès sur le domaine public numérisé.
SavoirsCom1 fait donc siennes les recommandations adressées par Communia au Congrès des Etats-Unis à l’occasion de l’appel à partenariats public-privé de la bibliothèque du Congrès. Les partenariats public-privé ont un rôle à jouer pour permettre à l’effort de numérisation du patrimoine de progresser, mais ils doivent être précisément encadrés par les pouvoirs publics de manière à préserver l’intégrité du domaine public. Conformément à la recommandation de la Commission européenne, le contenu de ces partenariats public-privé doit être rendu public (annexe I-4).
SavoirsCom1 incite les institutions culturelles à se tourner vers des instruments comme la Public Domain Mark, qui permet la diffusion du domaine public en ligne, sans ajout de nouvelles couches de droits (exemple)
SavoirsCom1 rappelle l’importance fondamentale de la préservation du domaine public à l’heure numérique et invite les responsables de la BNI et les élus irlandais à tenir compte des recommandations de Communia.
SavoirsCom1 appelle également les responsables politiques locaux, nationaux et européens à se saisir de cette question pour éviter que de simples accords contractuels, souvent négociés sans suffisamment de transparence, aboutissent à une érosion du domaine public au détriment de la diffusion de la connaissance.
Rétroliens/Pings