text_cache
Mise à jour : les accords ont été publiés, largement CADAviardés comme on pouvait s’y attendre.
Dans un avis daté du 18 avril, la Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA) a rendu un avis favorable à la communication des accords de partenariats passés par la BnF avec les sociétés Proquest, Believe et Memnon pour la numérisation de ses collections. Cet avis intervient en réponse à la demande de communication effectuée par le magazine Actualitté.
                                                                                                                                                                                                                    .
SavoirsCom1 salue cette avancée en faveur de la transparence dans cette affaire, qui répond aux demandes exprimées depuis des semaines par les associations qui se sont dit inquiètes à propos de ces accords, ainsi que celles des nombreux citoyens signataires d’une pétition en ce sens. Il est à ce titre déplorable que la BnF et le Ministère de la Culture n’aient pas fait droit d’eux-mêmes aux demandes de communication qui leur étaient adressées, allant même jusqu’à refuser la transmission des accords aux députés qui en avaient fait la demande.
                                                                                                                                                                                                            .
SavoirsCom1 demande à présent à ce que la publication des accords intervienne dans les plus brefs délais, afin  que le débat public puisse avoir lieu dans de bonnes conditions.
                                                                                                                                                                                                              .
L’avis rendu par la CADA est par ailleurs important, dans la mesure où la Commission a explicitement indiqué que la Filiale BnF-Partenariat devait être regardée comme une « personne privée chargée d’une mission de service public« , soumise en tant que telle aux obligations de transparence liées à la communication des documents administratifs. En cela, la CADA indique qu’il ne suffit pas à un établissement public administratif comme la BnF de créer une filiale, qu’elle détient à 100% avec à sa tête son propre président, pour s’abstraire des règles élémentaires garantissant le contrôle par les citoyens et par les parlementaires de l’action publique. Cette filiale est typique des « faux nez » dont l’administration s’affuble parfois pour échapper à ses obligations et il est heureux que la CADA ait fixé des limites à ce type de dérives.
                                                                                                                                                                                                          .
SavoirsCom1 relève également que la CADA s’est appuyée sur les recommandations de la Commission européenne en date du 27 octobre 2011, traduction directe des recommandations du Comité des sages européens sur les partenariats public-privé de numérisation dont SavoirsCom1 a appelé plusieurs fois au respect. Ces recommandations préconisent en effet que « le contenu des accords entre institutions culturelles et partenaires privés concernant la numérisation des collections culturelles devrait être rendu public« . Il aurait été simplement préférable que Bruno Racine, président de la BnF, qui avait été lui-même à l’origine de la création du Comité des sages, s’en souvint de lui-même.
                                                                                                                                                                                                         .
Ces points positifs étant relevés, SavoirsCom1 tient à exprimer ses inquiétudes concernant la portée donnée par la CADA dans son avis à la notion de « secret en matière industrielle et commerciale », qui risque d’aboutir à une publication des accords amputés de parties essentielles. La CADA estime notamment que « les éléments financiers, juridiques, techniques et fonctionnels de l’opération » relèvent de ce secret et ne doivent pas être communiqués, au motif qu’ils « traduisent l’inventivité » dont le partenaire a dû faire preuve pour répondre à l’appel. La CADA en déduit que « le montage juridico-financier et comptable mis au point par le partenaire retenu » pourra être occulté lors de la communication.
                                                                                                                                                                                                          .
Sur la base de ce raisonnement la CADA liste une série de parties des accords et d’annexes qui pourront être maintenus secrètes, alors qu’elles sont suceptibles pourtant de contenir des éléments d’informations essentiels pour juger de la nature et de la portée des exclusivités conférées aux partenaires privés par la BnF. Il est évident que la connaissance détaillée du « montage juridico-financier » constitue précisément ce dont le public a besoin pour être informé de manière satisfaisante en la matière. Avec une telle décision, la CADA ouvre une brèche qui pourra être utilisée à l’avenir par la BnF, mais aussi par toutes les autres institutions culturelles, pour numériser leurs collections dans des conditions opaques.
                                                                                                                                                                                                       .
SavoirsCom1 appelle la BnF, le Ministère de la Culture, mais aussi les partenaires privés impliqués, à faire preuve d’esprit de responsabilité et à communiquer le plus largement possible le contenu de ces accords, afin qu’une véritable information publique puisse avoir lieu, au-delà des limites posées par la CADA.
                                                                                                                                                                                                        .
SavoirsCom1 rappelle que lorsque la CADA avait été saisie en 2009 d’une demande de communication portant sur l’accord conclu entre la Ville de Lyon et Google, elle avait autorisé une communication complète du CCTP et d’autres pièces du marché, permettant ainsi de prendre connaissance de manière complète du montage juridico-financier. Pourquoi devrait-on faire deux poids, deux mesures avec la BnF aujourd’hui ? Faudra-t-il que le public se contente de documents lardés de grands coups de stabilo, là où il avait pu lire dans le détails les accords avec Google ? Est-ce cela que l’on est en droit d’attendre de la part d’autorités investies de la sauvegarde du patrimoine national ?
                                                                                                                                                                                                            .
SavoirsCom1 déplore que la CADA n’ait pas tiré toutes les conclusions qui s’imposaient de son propre raisonnement. Car si la filiale constitue bien une personne privée chargée de l’exécution d’une mission de service public, c’est la qualification même du contrat qu’il aurait fallu renverser. Cet étrange « appel à partenariats » que la BnF a lancé, véritable mariage de la carpe et du lapin, aurait dû être requalifié en appel d’offres, impliquant des obligations supérieures en matière de communication des pièces. C’est d’ailleurs un point sur lequel  tôt ou tard les juges administratifs seront appelés à se prononcer.
                                                                                                                                                                                                               .
SavoirsCom1 rappelle enfin que le collectif demande qu’une loi pour le domaine public en France soit votée, afin que les partenariats public-privé de numérisation soient strictement encadrés, pour que de  tels montages préjudiciables à l’intérêt public deviennent définitivement impossibles.