En sa qualité de co-présidente du Partenariat pour un gouvernement ouvert, la France accueillera le 4e Sommet mondial de l’Open Government Partnership (OGP) à Paris du 7 au 9 décembre prochainCe Partenariat regroupe aujourd’hui 70 États et des centaines d’organisations de la société civile qui agissent promouvant la transparence, la participation citoyenne et l’innovation démocratique à travers le monde.

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Cet événement est concomitant à la publication d’un décret par le gouvernement visant à créer le fichier TES qui rassemblera les données biométriques de 60 millions de français. Ce décret a été pris sans la moindre concertation préalable ni débat démocratique au Parlement.

Le Conseil National du Numérique (CNNum) s’est auto-saisi de cette question et a rendu un avis sur ce fichier, dans lequel il condamne fermement l’initiative autant sur le fond que sur la forme en déclarant :

aussi légitimes que soient les finalités initiales du Gouvernement, rien ne pourra techniquement prévenir leur extension future au gré d’une grave actualité. Il suffira alors, pour le pouvoir en place, de changer quelques lignes d’un décret pris en Conseil d’État après simple avis consultatif de la CNIL (depuis 2004 l’autorité ne dispose plus de son pouvoir de veto).

L’inquiétude la plus manifeste est évidemment que ce fichier puisse servir à terme à identifier« systématiquement de la population avec les moyens de la reconnaissance faciale ou de la reconnaissance d’image, à des fins policières ou administratives ».

C’est une énorme contradiction pour le gouvernement d’avoir adopté une mesure aussi grave sans concertation, alors que la France accueille le sommet de l’Open Government Partnership début décembre. La tenue d’un tel événement sous état d’urgence et après le vote d’une litanie de lois sécuritaires était déjà problématique. Avec ce nouvel épisode du fichier TES, le hiatus devient insupportable.

Le collectif SavoirsCom1 avait proposé une intervention à l’OGP sur les Communs de la connaissance, qui a été retenue au programme par le comité de sélection.

Rejoignant les critiques du CNNum, nous avons décidé de boycotter cet événement en réaction à l’instauration de ce fichier. 

Nous étions déjà intervenus en novembre 2015 lors de la mise en place de l’état d’urgence, en rappelant que les dérives sécuritaires s’attaquent au principe même des Communs, car ces derniers entretiennent des liens indéfectibles avec les libertés fondamentales.

Avec la mise en place de ce fichage systématique de la population, le gouvernement porte un coup mortel à la confiance qui peut être placée en l’État. Or, les Communs ont besoin de pouvoir nouer des relations avec les autorités publiques dans un cadre de confiance et de respect mutuel, ce qui deviendra à terme impossible si l’Etat est transformé en structure de surveillance, de répression et de contrôle social.

Le CNNum appelle le gouvernement à suspendre immédiatement l’application du décret et à ouvrir le large débat démocratique qui aurait dû précéder une telle décision. Nous appuyons cette revendication et nous appelons tous les acteurs des communs et les organisations sensibles à la défense de la démocratie et à l’innovation citoyenne à ne pas se rendre au sommet de l’OGP en cautionnant ainsi implicitement les contradictions du gouvernement.